J’ai toujours su que j’avais été exposée in utero au Distilbène, car ma mère, dans l’Education Nationale, recevait la revue de la MGEN et avait appris ainsi la dangerosité de ce produit. Elle ne m’a jamais caché qu’adulte, peut-être, j’aurais des problèmes. Lorsque vers 23, 24 ans, j’ai envisagé d’avoir un enfant, j’ignorais quelles seraient les conséquences du Distilbène sur moi, même si ma mère m’informait régulièrement.

Aucune grossesse n’arrivait, au bout de quelques mois je me suis adressée à une gynécologue qui a pensé que je n’ovulais pas, et sans avoir fait un quelconque examen, m’a prescrit des piqures d’hormones qui ont été totalement inefficaces.

Ayant déménagé, j’ai changé de gynécologue et celui-ci m’a envoyé vers le Pr Hédon, qui m’a très bien suivie. Puis des examens en nombre incalculable ont commencé et on a découvert un utérus en T.

L’infertilité a été constatée, avec de nombreux examens. Finalement, nous sommes arrivés à la FIV mais aucune implantation n’a fonctionné.

Mon mari et moi avons divorcé et ensuite, j’ai rencontré mon compagnon. Compte tenu de mon parcours, nous n’utilisions pas de moyen de contraception.

Je souhaitais perdre du poids et me suis adressée à un diététicien de l’hôpital, qui m’a prescrit du Médiator…

A cette période, j’ai eu de nombreuses nausées, que j’ai mises sur le compte de ce médicament que j’ai très vite stoppé, et j’en ai fait part au médecin. Il m’a fait faire un test de grossesse, qui s’est avéré positif !

J’étais donc enceinte, naturellement, au bout d’un an et demi de vie avec mon compagnon. Mais la grossesse s’est mal terminée, j’ai fait une fausse couche vers 2 mois et demi… On pleure beaucoup et en plus, il a fallu en passer par un protocole d’avortement médicamenteux pour éviter d’abîmer les organes par un curetage. C’était très dur de signer un tel protocole de demande d’IGV, alors qu’on vient de perdre un enfant si longtemps espéré…

La vie a repris son cours. J’ai revu le Pr Hédon qui m’a proposé une hystéroplastie d’agrandissement, parce que je remplissais les critères et que nous avions la preuve que je pouvais être enceinte. L’intervention s’est bien passée.

Après l’agrandissement de l’utérus, et une cure de synéchie, j’ai eu un frottis anormal, et j’ai dû consulter en urgence un cancérologue. Le 1er contact avec ce médecin m’a refroidie, il laissait entendre que son intervention serait très radicale (invasive). Je craignais de ne pas pouvoir mener de grossesse après.

J’ai appelé Réseau D.E.S. France et, sur leur conseils très avertis, je suis allée consulter un médecin à Marseille. J’ai eu une conisation, pour préserver mes chances de grossesse, et 9 fois plus tard j’étais enceinte, encore une fois naturellement.

Arrêtée à 2 mois et demi de grossesse, j’étais au repos à la maison. Puis à 4 mois, lors de l’échographie, on s’est rendu compte que notre fils avait les deux pieds bots. Ce radiologue nous a envoyé voir un confrère à Nîmes et à tout hasard j’ai préparé un sac. Bien m’en a pris, mon col était très court et déjà partiellement béant, et je n’ai pas pu rentrer chez moi. J’ai été hospitalisée jusqu’à la fin de la grossesse, avec interdiction de mettre un pied par terre.

Cette hospitalisation a été particulièrement dure, car l’équipe médicale craignait que les pieds bots ne soient le signe d’autre chose : mon fils pouvait être porteur d’une myopathie, ou bien d’une trisomie 21… Toute cette angoisse s’est rajoutée à la crainte d’accoucher prématurément, du fait de mon exposition au DES.

Le jour des 6 mois j’ai commencé à perdre les eaux. Une antibiothérapie a été mise en place mais 7 jours plus tard mon enfant avait une infection. 2 jours plus tard, une césarienne a été décidée.

Mon fils est resté 2 mois en soins intensifs, puis en néonat. Toute cette période était marquée par la peur : ne pas savoir en arrivant le matin comment la nuit s’était passée… Cette peur s’est amplifiée lorsqu’il a été sorti du berceau chauffant, lorsqu’il a été débranché de toutes ces machines qui lui avaient sauvé la vie.

(Cette peur, qu’il n’arrive pas à se suffire à lui même, pour sa température, pour respirer, est restée longtemps, y compris après son arrivée à la maison.)

Il a été transféré dans un autre hôpital, dans un service vraiment spécialisé pour traiter ses pieds bots. Ce n’est qu’à 3 mois et demi qu’il est arrivé à la maison. Il était tellement petit que ma propre mère osait à peine le prendre dans ses bras.

Il a aujourd’hui 10 ans. Après plusieurs années de traitements quotidiens de ses pieds bots, d’attelles diverses et variées, de séances hebdomadaires chez le kiné, il ne reste qu’une surveillance tous les ans ou tous les deux ans. Sa prématurité lui a servi en fait, de ce point de vue, car les soins ont commencé à 1 semaine de vie, bien plus précocement donc que pour un enfant né à terme. Maintenant, quelqu’un qui n’est pas au courant qu’il a des pieds bots ne peut pas s’en rendre compte. En CE1, après un bilan en orthophonie, une dyslexie a été décelée mais ce n’est que depuis le CE2 que mon fils bénéficie d’une prise en charge : il y a une nette amélioration. Il est maintenant en CM1, il va bien, il fait tout ce que font les autres.

J’avais 41 ans au moment de ma 2ème grossesse.

Après un alitement complet, à domicile, avec visite de la sage-femme 2 à 3 fois par semaine et aide ménagère tous les jours, notre second fils est né à terme, par césarienne.

Pour mes parents, ma première grossesse a été tellement traumatisante qu’ils ont particulièrement redouté la seconde.

Je mesure notre bonheur, d’autant plus en lisant les témoignages que vous publiez. J’ignore comment j’aurais pu réagir si le DES m’avait fait vivre d’autres drames.

Happy end pour notre histoire !

Hélène