Nous avons reçu ce témoignage la veille du résultat d’un procès en Cour d’Appel de Paris (cf rubrique historique de la molécule).
« Je suis « fille Distilbène ». Ma mère a pris ce médicament pendant 9 mois en 1968. Nous avons retrouvé les ordonnances de l’époque sur l’ordonnancier gardé dans les archives du pharmacien. Cela aurait dû être une preuve écrite d’une importance capitale.
Mon passé gynécologique est très lourd. Dysménorrhée, endométrioses à répétition, utérus en T, infertilité, deux fausses couches, et par «miracle» deux grossesses difficiles, douloureuses, strictement alitées et médicalement surveillées tous les 15 jours à l’hôpital de la Croix Rousse à Lyon.
Comme j’ai beaucoup déménagé, j’ai connu plusieurs médecins qui ont tous diagnostiqué la même chose : hypoplasie utérine. Vue et suivie par des professeurs en médecine, membres du Conseil Scientifique de Réseau D.E.S. France.
La dernière endométriose, sévère, fut suspectée être un début de cancer, donc hystérectomie totale et annexielle (ovaires et trompes) à 33 ans !
J’ai intenté un procès avec toutes les preuves et les témoignages, et un avocat spécialiste du DES. Ce fut le procès de la honte et de l’humiliation avec des expertises odieuses et des comptes-rendus scandalisant les professeurs qui m’ont toujours accompagnée !
Après 4 années de combat, j’ai gagné : le montant accordé a juste suffi à couvrir mes frais d’avocat, alors que mon dossier comprenait des preuves éloquentes !
Donc je réagis en voyant les actualités pour ces deux plaignantes dont le jugement sera rendu demain, 26 octobre 2012.
L’injustice de la justice ! Quand l’argent rend les hommes irresponsables, on laisse des milliers d’enfants victimes d’un médicament nocif. C’est scandaleux.»
Virginie
Ce témoignage suscite en nous, l’équipe de rédaction de Réseau D.E.S. France, plusieurs réflexions.
Notre ressenti est que cette procédure n’a pas permis à Virginie d’être apaisée, d’avoir le sentiment de justice, car la réparation financière est ridicule, au regard de son histoire et des souffrances endurées.
Nous devons nous rappeler qu’une procédure ne peut pas réparer les dommages. Quel que soit le montant obtenu, il ne pourra jamais réparer ce que le DES a causé dans notre vie, lorsqu’on se sent blessée dans notre corps.
Son témoignage montre que chacun progresse dans sa propre histoire, à son rythme, et que les procédures, outils d’apaisement pour les uns, ne sont pas nécessairement la solution pour les autres.
Penser que toutes les «filles DES» devraient se réunir pour agir en justice, c’est ne pas prendre en compte le cheminement de chacune. Aller ou ne pas aller en procédure n’est ni une bonne, ni une mauvaise attitude. Cela doit rester une décision personnelle, prise de manière éclairée, et après avoir cerné précisément ses motivations et les risques encourus.